Code commenté - Droits des femmes
Décodage en 5 questions à Diane Bernard et Chloé Harmel - Fem&Law
Quelle égalité entre femmes et hommes en 2020 ? Telle est la question posée par Fem&L.A.W., pour International Feminist Legal Association for Women's rights, une jeune a.s.b.l. créée par des femmes, juristes et féministes dont l'objectif social est au confluent du droit et des féminismes. Fem&L.A.W. désire mettre le droit au service des femmes et les féminismes en action dans le droit. L'association s'inscrit dans un héritage féministe et un tissu associatif; ses membres combinent engagement féministe et expertise juridique.
L'égalité entre toutes et tous est inscrite dans la Constitution et divers instruments internationaux : c'est un principe fondamental de notre société. Elle n'est cependant pas (encore) effective : aujourd'hui, les femmes n'ont pas les mêmes droits que les hommes. L'ouvrage recense et commente les instruments qui, directement ou indirectement, affectent les droits des femmes - soit qu'ils les promeuvent, soit qu'ils les mettent en péril. Parmi ces instruments, nous retrouvons des conventions internationales, des directives européennes, des lois et décrets, des arrêtés royaux qui constituent autant d'occasion de s'interroger sur la place des femmes dans le droit.
Échange avec Diane Bernard, Professeure à l'Université Saint-Louis et Chloé Harmel, assistante en droit patrimonial de la famille à l'UCLouvain, sur cet ouvrage sans précédent.
À qui est destiné ce Code ?
Il est d'abord destiné aux praticien·ne·s, celles et ceux dont le droit est l’outil de travail privilégié : les avocat·e·s et les magistrat·e·s. Bien sûr, les commentaires qui composent ce Code permettront peut-être de soutenir aussi l’action courageuse que mènent les associations de terrain au côté de femmes en difficulté, voire en détresse. Et enfin, qui sait si les réflexions lancées intéresseront celles et ceux qui font œuvre législative ? Ce code est effectivement l’occasion de rappeler que le droit n’appartient pas qu’aux juristes : pilier de la vie en société, il est empreint de questions politiques – en l’occurrence sur le statut des femmes – dont toutes et tous sont invité·e·s à s’emparer. Nous avons voulu proposer à la fois une « boîte-à-outils », avec des textes et arguments permettant de mieux défendre les droits des femmes, et une « caisse de résonnance », pour ouvrir la réflexion sur l’état du droit et ses évolutions souhaitables ainsi que, plus généralement, sur les inégalités qui caractérisent encore notre société.
Quels sont les "enjeux économiques, sociaux et culturels" que vous avez identifiés ?
Dans le Code, les commentaires en droit économique et des affaires, en droit du travail et de la sécurité sociale, ainsi qu’en droit fiscal et des médias, convergent malgré leurs spécificités disciplinaires et les sensibilités distinctes des auteur·e·s qui s’y sont intéressé·e·s : l’organisation de la société, notamment par le droit, concourt indirectement au maintien de la précarité des femmes, sachant qu’elles sont largement majoritaires parmi la population la plus vulnérable. Elles gagnent moins d’argent que les hommes, ont beaucoup plus de difficultés à mener une vie professionnelle satisfaisante, ni les aides sociales ni les pensions ne sont pensées en fonction de leurs conditions de vie, les stéréotypes se maintiennent jusque dans les sphères culturelles... Ainsi, par exemple, plus de 80% des familles monoparentales sont à la seule charge de femmes – ce qui a des conséquences sur leur travail donc sur leur pension, sur leur capacité financière donc leur logement, etc.
Quels sont les enjeux en droit pénal ?
Les auteures des différents commentaires en droit de la famille convergent dans leurs constats, qu’elles traitent des relations dans le couple, entre parents et enfants, ou des régimes matrimoniaux : dans les faits, la jurisprudence et les textes de loi, un certain modèle de famille est encore promu, qui gomme la réalité des inégalités qui frappent les femmes. Ainsi, en pratique, ces dernières sont très largement majoritaires parmi les personnes créancières de contributions alimentaires impayées ; dans la jurisprudence, certaines tendances se maintiennent qui consistent à ne pas prendre leur parole au sérieux et à dissocier les violences qu’elles ont subies des décisions en matière de divorce et de garde des enfants ; dans les textes, tant le droit patrimonial de la famille que la fiscalité familiale semblent produire des effets à contre-courant de l’émancipation économique et sociale des femmes préconisée de longue date à l’échelon international.
En quoi les droits des femmes sont-ils une question "transversale"?
Les droits des femmes ne sont pas une branche du droit : la question de la reconnaissance, du respect et de la protection des droits des femmes est bien sûr ancrée au cœur des droits fondamentaux, dans le principe d’égalité en particulier, mais elle se prolonge dans des champs divers – le droit public, le droit des personnes et de la famille, le droit du travail et des affaires, le droit de la migration, le droit fiscal, le droit pénal et pénitentiaire, le droit judiciaire, etc.
Pour visibiliser ce caractère transversal, nous avons rassemblé des textes généralistes dans l’une des sections du Code (y sont commentés la Constitution belge, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes, la Convention d’Istanbul, plusieurs instruments en droit de la non-discrimination, etc.) avant de traiter les différents thèmes de façon plus classique, par branche de droit. Mais en première partie du Code, nous avons aussi conçu un index annoté, qui offre divers renvois au départ de mots-clés évocateurs : ceci permet de naviguer d’une branche du droit à une autre, d’un commentaire à l’autre, et donc de faire des liens entre des approches et instruments divers.
Quels sont les enjeux en droit de la famille ?
Les auteures des différents commentaires en droit de la famille convergent dans leurs constats, qu’elles traitent des relations dans le couple, entre parents et enfants, ou des régimes matrimoniaux : dans les faits, la jurisprudence et les textes de loi, un certain modèle de famille est encore promu, qui gomme la réalité des inégalités qui frappent les femmes. Ainsi, en pratique, ces dernières sont très largement majoritaires parmi les personnes créancières de contributions alimentaires impayées ; dans la jurisprudence, certaines tendances se maintiennent qui consistent à ne pas prendre leur parole au sérieux et à dissocier les violences qu’elles ont subies des décisions en matière de divorce et de garde des enfants ; dans les textes, tant le droit patrimonial de la famille que la fiscalité familiale semblent produire des effets à contre-courant de l’émancipation économique et sociale des femmes préconisée de longue date à l’échelon international.